dimanche 7 juillet 2013

VNDL - Gahrena:Structures (Hymen Records - ¥812) 2013



VNDL est de ces designers pour qui les lignes architecturales ne se calquent sur aucun modèle préconçu.  Celui qui bâtit des cathédrales qui selon les lois de la gravité devraient se casser la gueule, mais qui restent quand même stables, et sacrément solides. Celui pour qui les perspectives à la Esher prennent des accents de réel. Lignes aux courbes rompues, enchevêtrées dans une sphère à la fois claustrophobique et aux limites insondables. De ce premier constat peuvent émerger bon nombre d'hésitations quant à la logique et la cohérence des productions du Montréalais. Particulièrement convaincant sur l'opus précédent, les diverses déconstructions emblématiques du style de Philippe Vandal font mouches une fois de plus à l'écoute de cette seconde partie du diptyque Gahrena. Alors certes, la composition reste difficile à cerner, voire même à appréhender, tant le niveau d'abstraction est soutenu, aussi bien rythmiquement que mélodiquement parlant.

On aurait voulu rester totalement objectif en nous embarquant dans ce second jet, oubliant de A à Z le Gahrena premier du nom, tant l'enthousiasme généré à sa sortie fût grand. Donc bien évidemment, l'effet de surprise n'est plus, mais l'impact est (très) loin d'être amoindri. Fuyant toute forme de pathos, les mélodies se font toujours aussi suaves et discrètes, n'allant pas titiller les glandes lacrymales pour un oui ou pour un non. Le sound design continu également d'être le moteur de la production. Et c'est sans peine que l'on dira qu'à ce niveau, il y a eu du progrès, encore, ajouté à un mastering quand même bien foutu. Certains critiques diront que VNDL se perd dans ses délires électroniques. Que sa musique n'est qu'un bloc de béton presque impossible à franchir. J'appelle ça de la fainéantise. Sans pour autant aduler les casses-têtes, ce Gahrena:Structures s'inscrit comme une forme moderne (fururiste?) de Rorschach. Une oeuvre semble-t-il assez personnelle, délicieusement labyrinthique. On se laisse donc manipuler, comme des pantins. On se laisse donc perdre, en gardant en tête que, où que nous allions, il y aura une sortie prévue pour nous. On retiendra les plus beaux bijoux de la couronne, j'ai nommé Beaches 70 et Insom, là où le mot perfection prend des tournures d'euphémisme enseveli 6 pieds sous terre. 

Questionnaire à choix multiples, psychédélisme du XXIème siècle. Merci.

Have Faith!


samedi 1 juin 2013

Fausten - Fausten (ADN167 - Ad Noiseam) 2013



Cette chronique ne peut que s'envisager comme un vulgaire champ lexical ambulant, un dégueuli de synonymes gravitant autour de tout ce qui ce fait de plus crade en matière de saloperies. Tout un panel de textures horrifiques condensées en un seul et même corps rongé de l'intérieur. Un visage meurtri, bouffé comme une roche érodée. Indomptable titan qui distribue ses uppercuts par paquets de dix, Fausten est un album qui prône la commotion cérébrale et la perte de dents précoce à grands coups de phalanges. En revanche, oublions tout ce qui relève du doux, du beau, du relaxant. De rouille et de rouille. Si vous étiez venus vous faire caresser les esgourdes, il semblerait que vous ayez fait fausse route. L'idée même d'une quelconque tendresse est totalement désuète dorénavant. On avait rarement entendu quelque chose d'aussi violent, sur tout les plans, que ce premier jet. Le mastering (sacrément costaud) creuse d'autant plus ces cavités pour contraster les textures écailleuses sur lesquelles on nous frotte la tronche avec un plaisir malsain. Le grand malaise. Oui, car en fin de compte, outre la force de frappe de ces rythmiques qui se pèsent en terme de tonnes (Punishment, Stahlblumen), les onze titres dérangent, foncièrement. Écouter Internal dialogue vous fera comprendre, Portal également (même s'il serait évident de tous les citer). À ne pas écouter de bon matin si vous souhaitez garder un brin de bonne humeur et de joie de vivre pour la journée. Mais esquisser un semblant d'explications concernant ces onze salopards relève presque de l'inutile. Le tracklisting se suffit à lui-même. Ça parle de lames affûtées, de tripes à l'air ou encore de punition, et donc ça en dit long sur le contenu.  En fin de compte se référer à l'artwork est la meilleure des manières pour illustrer cet éponyme et premier essai du duo Monster X/Stormfield qui dans son style, ne jouant certainement pas dans la dentelle, fonctionne d'un bout à l'autre. Éreintant mais scotchant. C'est grand!

HAVE FAITH


dimanche 19 mai 2013

Arktor - Cotton Mather Estates Side A (Echotourist - Echt07) 2013




Ce papier ne concerne que la 1ère partie de l'album Cotton Mather Estates. Les deux étant quelques peu divergeantes, il fallait faire un choix. La balance penche inexorablement en faveur de cette face A, surprenante sur de nombreux points. Non ce n'est pas un mastering à la Hecq, ni même un sound-design du XXIIIe siècle, encore moins l'originalité des timbres employés qui sortent cet opus du lot. Inconnu au bataillon, ce Arktor dresse un univers singulier, mais surtout profondément cohérent. Tête baissée, suivant son fil conducteur sans jamais se laisser distraire, le doigt du milieu bien mis en évidence. Ce Side A forme un tout homogène, aux enchaînements logiques mais non moins dénués de surprises. Sa musique me rappelle énormément celle de Aynth, dans une version moins torturée et noisy. C'est avant tout cette aptitude à immerger l'auditeur dans un espace à part, s'esquissant toujours plus précisément morceau après morceau qui fait de cet album un rebut de la catégorie des LP "déjà-entendus que l'on oublie rapidement". Cotton Mather Estates Side A dégage quelque chose de fort, peut-être même de très personnel, face auquel il me semble compliqué de rester de marbre. Il est de ces albums qui au premier abord, se laissent écouter avec facilité, laissant ce je ne sais quoi de persistant bien logé au milieu des neurones qui pousse à la lecture intégrale en boucle. Les titres se ressemblent donc grandement. De là, impossible d'en décrire un sans détailler involontairement les autres. À nuancer toutefois, puisque certains tirent leur épingle du jeu. Notamment Last Winter Smudge le plus beau morceau des dix. Un brin plus chaotique que ses camarades, les drums bancales et craquelés de part en part y jouant pour beaucoup. La musique d'Arktor est infiniment intense et immersive, usant d'outils déjà bien effrités, mais avec une dextérité qui l'honore. En outre, ne crachons pas sur la deuxième partie qui est elle aussi surprenante, mais je vous laisse le soin de vous forger votre propre avis. Le tout est en free download, donc on se gave.

HAVE FAITH

samedi 18 mai 2013

Access To Arasaka - Écrasez l'infâme (CRL Studios - CRL045) 2013




Je n'avais pas eu vent de l'annonce de cette release. Le jour de sa sortie donc, je vous laisse imaginer la surprise. Access to Arasaka est bel et bien de retour en solo suite à son Geosynchron dévoilé chez Tympanik Audio en 2011. Le beatmaker outre-atlantique pointait également le bout de son nez sur un split avec Tokee et Lucidstatic il y a de ça un mois, cette fois-ci chez CRL Studios, structure qui accueille ce tout nouveau 6 titres. Un jeu de caractères vient baptiser chaque titre. Des tirets. Espacés ou non. Intitulé dans la langue de Molière, ou plutôt celle de Voltaire dont la célèbre formule a inspiré le nom de l'EP, Écrasez l'infâme sonne différemment de ce à quoi nous avons été habitués. Le coup de pinceau caractéristique de Robert Lioy est toujours aisément reconnaissable, mais quelque chose a en effet changé. Sa musique semble évoluer, illustrant désormais une nouvelle facette de l'éventail cybernétique dont lui seul semble détenir les ficelles. Fort heureusement pour nous, AtA ne se repose pas sur les exacts mêmes recettes qui ont fait son succès, à savoir les atmosphères glaciales et futuristes et autres drums déchiquetés au glitch. Les productions sont ici plus ambiantes, les rythmiques étant soit totalement absentes (-- -----) soit très lentement amenées. Le panel de textures est aussi plus large, traité différemment de ses précédents opus. Tout ça a gagné davantage en profondeur et en maturité. Là où Geosynchron tendait souvent à séparer de manière très distincte glitchs et nappes, Écrasez l'infâme amalgame le tout dans un environnement spatial un peu plus uniforme. Les drums sont moins secs (-- -, - - -), gagnent en stabilité, et les mélodies se montrent plus denses que jamais (--, le somptueux et parfait en tout point ---). Pour résumer, c'est toujours aussi destructeur, mais les outils employés ont connus quelques modifications. AtA s'est inspiré des dires du passé pour mieux décrire son univers futuriste qui semble toujours aussi apocalyptique. Il se pourrait bien que cet EP marque une étape importante dans sa carrière, faisant office de transition vers quelque chose de bien moins déchaîné, peut-être même d'émotionnellement plus puissant. Mais ne regardons pas trop loin, apprécions plutôt cette demi douzaine de morceaux comme il se doit, parce qu'une fois de plus, c'est du costaud. 

HAVE FAITH


vendredi 17 mai 2013

Transmissions from the Heart of Darkness - Elsewhere (Des cendres à la cave) 2013




En plus de bénéficier de superbes artworks signés Lou Nugues, le blog Des cendres à la cave est parvenu à rassembler sur cette immense compilation l'équivalent de tout ce que j'écoute depuis des années. Cela même avec des titres exclusivement produits pour l'occasion. Il va sans dire qu'une fois les diverses tracklists annoncées, l'enthousiasme apparaissait difficile à contenir. Plus de 60 noms, enrôlés dans une aventure dont nous n'aurions voulu connaître le terme (un peu comme Les feux de l'amour). 5 chapitres, scindant distinctement les diverses étapes de cette nouvelle si passionnante. Mais alors, à ma grande surprise, c'est cette dernière qui aura retenu toute mon attention. Très certainement la plus cohérente des cinq. Le fait d'y trouver un nombre plus réduit de musiciens (par rapport aux parties précédentes) doit jouer pour beaucoup. Elsewhere aura finalement eu raison de moi. Je suis désormais réconcilié avec l'ambient, dont je n'écoutais que très peu de sorties depuis quelques temps. Les recherches hasardeuses sur le net, couplées à l'impressionnisme poussé et fascinant dans les premiers instants (mais finalement un brin rébarbatif sur la longueur) inhérent à ce type de compositions m'ont alors lassé et écarté lentement de cette noble branche musicale. L'ultime partie de Transmissions from the Heart of Darkness est alors, comme vous vous en doutez maintenant, un pur chef d'oeuvre d'ambiances. Les titres sont longilignes, le flux étant déversé sur des durées allant de 4 à 18 minutes. Pour ma part, quelques sublimes découvertes, qui enjolivent davantage la peinture. C'est le cas de Methuselah ou encore Wastelanders, qui ouvre la marche aux côtés de Kira Seto. D'emblée une excellente surprise. Une rêverie à fleur de peau suivie de très près par l'impressionnant More than ever signé Vitor Joaquim, auteur de l'immanquable Filament nominé cette année aux Qwartz Electronic Music Awards. Quelques re-découvertes également, notamment Jerome Faria et son sublimissime 100421. Les morceaux sont réussis, tous sans exception. De sacrés beaux efforts fournis en téléchargement gratuit au service de l'équipe de DCALC, grande amatrice des univers sombres qui réussit là un joli coup. Cet article n'est donc qu'un preview sur ce qu'est le contenu réel de Elsewhere, mais rien ne sert d'en dire plus. Chaque morceau est une nouvelle surprise, une vision différente mais pourtant intimement liée aux autres. Et c'est tout. Chapeau.

HAVE FAITH

ps: si vous voulez en savoir un peu plus sur cette compilation, vous pouvez aller voir le bandcamp du blog.


ZENИTH - Ritual (BLWBCK - BLWBCK033) 2013




Tout d'abord je tiens à remercier du fond du coeur le copier/coller. Oui parce que ZENИTH ce n'est pas forcément évident à écrire. Parenthèse refermée, débutons par ce qui est réellement important. ZENИTH est un duo toulousain tout fraîchement formé, visiblement peu avant le berceau de cette nouvelle année 2013. La formation est jeune, certes, et confronté à ce Ritual il est difficile de ne pas émettre quelques soupçons, en particulier lorsque l'on est de mauvaise foi. En si peu de temps de vie, comment est-il possible de pondre un objet aussi cohérent? Il y a donc deux options. Soit Tony Llados et Guillaume Sauvage se connaissent depuis toujours et ont été éduqués par les mêmes mélodies, les mêmes inspirations. Soit leurs gènes musicaux respectifs étaient faits pour coïncider de la plus parfaite des manières, les uns venant compléter les autres, et réciproquement. Le résultat est maîtrisé, oh putain que oui. Mais ce n'est pas le point le plus important à montrer du doigt. Ritual développe une musique modeste, lancinante, et incontestablement solaire. Les effets sont minimes, faiblement perceptibles sans une écoute au casque, volume bien évidemment amplifié à son paroxysme. Les guitares revêtent ce grain spécifique qui réchauffe lentement les âmes, et fait s'évaporer les rosées matinales (FogMoon). Cette lumière est duveteuse, apprivoise nos yeux avec grande courtoisie. Du haut de ses 35 petites minutes, ce disque là maintient l'attention et une fascination immuables, parce qu'il faudra dire les choses telles qu'elles se présentent, la musique de ZENИTH a de la gueule. Sans prétention aucune, conjuguant cordes floutées et voix délicatement filtrées (Glass) aux drones ci et là plus imposants. Parfois plus menaçante, bien plus intense, là où les faisceaux lumineux se font plus aveuglants et paradoxalement d'autant plus beaux (B&W Road). Ritual, ou comment donner une leçon de reverbe sans tomber dans le stéréotype des musiques spatiales. Un premier opus qui en dit long. On attend la suite, qui sera souhaitons le fort, de même acabit. À noter pour clôturer ce blabla: les trois dernières minutes du titre final font très, très très mal. 



HAVE FAITH!






samedi 20 avril 2013

Crypture ‎– Bifacial (Echomania ‎– [echm-014]) 18 mars 2013



Le label biélorusse Echomania ne vous est surement pas totalement inconnu si vous suivez un tant soit peu ce blog. Le savoureux Scape Destructive Putrescent, effort signé Klaus Kinski, avait fait l'objet d'un article l'été dernier. Passons l'étape de la présentation donc. Eugene Mitskevich, manitou de la net-structure, exerce sous le pseudonyme Crypture et cédait le mois dernier toujours en téléchargement gratuit une pièce des plus intéressantes, j'ai nommé Bifacial, produite et masterisée entre 2010 et 2012. Quelle étrange pièce que voilà.

Hydre à deux têtes, difficilement identifiable avec précision. Double visage, bipolarité, noir ou blanc, autant d'idées vagues et au premier abord vides de sens auquel l'intitulé peut référer. De cette observation naît toute une flopée de questionnements. Le plus pertinent étant de s'interroger sur le lien tissé avec l'artwork. Une architecture d'acier et de béton, bouchon de liège démesuré qui divise mère nature comme Varsovie en 39-40. Il y a d'une part ce torrent libre, puissant, qui dégueule ses mètres cubes d'eau, faisant fi des obstacles, abstraction faite de ce caillot grisé qui, d'autre part, apprivoise la bête, gardant un oeil autoritaire sur les moindres faits et gestes de son voisin de palier.

Le sauvage, (le belluaire) et le dompté. C'est peut-être de cette manière là que l'album (l'EP?) s'interprète. Mais qu'importe, puisque la traduction est libre à chacun. Bifacial s'appréhende de deux façons. Il se dessine de prime abord sous l'impulsion de Steel, Fog and Mutilated Tree, entièrement atmosphérique, drapé de drones impressionnistes. Paisible, dompté, mais déjà troublant. Pseudo poursuit alors le même chemin, mais ce durant la première minute de son existence. Nous avons connu le dompté, nous sommes sur le point de connaitre le sauvage. Et là, tout est différent. Le virage est à 90°, coupé net par la détonation glaciale de cette 56ème seconde qui ne manque pas de coller son lot de frissons. Le chemin se divise progressivement en une multitude de réseaux, circuits imprimés et élaborés à grand coups de breakbeats cinglants. Nous avions fait fausse route. N'étant pas foncièrement sensible à ce type de rythmiques, cette fois je dois avouer que je suis totalement convaincu.

Bifacial est globalement assez sombre, pour ne pas dire totalement noir par moments. C'est dans ces eaux troubles, silencieuses où vagabondent des dizaines de créatures indiscernables qu'Eugene Mitskevich nage avec le plus d'aisance et d'efficacité. Les productions apparaissent bien plus poignantes, intenses et profondément immersives, conséquence logique de la comparaison immédiate avec Keep Balance notamment, titre final tout de même plus lumineux, juste milieu en demi-teinte d'un parcours sacrément orageux. Retenons alors le progressif Submarine. Collapse ou encore (et surtout) Mass Movement. Ses textures stridentes, sa force de frappe impressionnante, et ses lignes mélodiques à vous figer un flux artériel. Une sacrée taloche...

Crypture brille lorsque ses idées noires le transcendent. A l'inverse, ses productions perdent en expressivité tandis qu'elles se vêtissent d'un linceul plus lumineux. Dans son ensemble, Bifacial reste de grande qualité, en prenant comme référence les morceaux susmentionnés, et ne présage que du bon pour la suite.  Eugene Mitskevich est capable du meilleur malgré quelques succincts incidents de parcours. Restons optimistes, cela sera sûrement corrigé dans les prochaines releases. Un 7-titres qui reste tout de même indispensable, et téléchargeable ci-dessous.

Have Faith!