Si ce nom vous est inconnu, permettez moi d'ajuster le tir. Plus récemment présent sur la compilation Fabriksampler V4 mise en vente par l'écurie Pharmafabrik dont on parlait il y a quelques temps ici, le slovène Luka Prinčič donne de la voix sur le morceau They give us body relativement turbulent aux côtés de Neven M. Agalma, Cezary Gapik ou encore du français Franck Vigroux. Si vous connaissez Matija Ferlin, peut être votre route a t-elle pu croiser en chemin Sad Sam Lucky Outtakes, généreuse offrande ambient/drone réalisée par notre Nova deViator en parallèle du manifeste éponyme proposé par le chorégraphe croate susmentionné, rendant lui-même hommage aux travaux du poète slovène Srecko Kosovel. Un album qui aurait pu aisément terminer sur ce blog s'il n'était pas si récent. Un jour peut-être!
Luka prend plaisir à s'aventurer sur plusieurs terrains différents.Tantôt propice à la sérénité, tantôt à la frénésie noise, sa musique joue un double jeu. C'est ce même constat que l'on déterre une nouvelle fois via ce Expression front, résultat direct du Communication front 2001 qui se déroulait en Bulgarie, plus précisément à Plavdiv.
Du noise. Mais pas n'importe lequel. Ayant recueilli quelques discussions et avis auprès des personnes présentes à l'évènement, le slovène nous soumet donc un travail 2 en 1. D'une part les enregistrements spontanés auxquels il se joint également, placés aux extrémités des pistes, et d'autre part la participation plus "personnelle" du musicien. Album assez spécial en somme, puisque les essais expérimentaux laissent une place importante aux discussions. Rassurez vous, le tout est très bien amené, et apporte un certain mystère à l'ensemble. La rythmique émanant de cette radicalité noise témoigne d'un grand talent en la matière. L'homme dompte sa monture avec agilité et brio, donnant naissance à des séquences disloquées mais néanmoins profondément jubilatoires, à l'image de l'Expression front 002. Les textures se mêlent, s'entrechoquent, fusionnent, donnent vie à de nouveaux organismes qui à leur tour se combinent. Le résultat est ahurissant et surtout inhabituel, rarement on a entendu quelque chose de semblable, d'aussi émouvant finalement...
Pour autant , les pistes ne se résument pas à ce cheminement rocailleux. Monsieur deViator humanise en douceur ses morceaux (en plus des conversations) en leur incrustant quelques nappes ou mélodies translucides, comme pour amortir le choc, ou désinfecter la plaie. Ceci n'étant valables que pour les variations 002 et 003, au contraire de la 005 qui pousse son agressivité à un niveau aussi aride que brutal.
Outre les magnifiques stridences des premières démonstrations, c'est vers le drone que s'engage le slovène, drone tout à fait obsédant compte tenu des chuchotements répétitifs balayant le quatrième chapitre.
Le seuil minimaliste est atteint avec l'ultime effort comateux 006. Le musicien jongle entre bruit et silence, ce dernier prenant presque le dessus à vrai dire, en tout cas à travers la première minute. Les voix se veulent plus discrètes, l'horloge tourne au ralenti et parfois même recule de quelques secondes. Tout le travail repose sur les reverbs' et son penchant pour l'absence de stimulus auditifs.
Luka Prinčič signe ici un album fascinant et insondable qui conforte une fois de plus le talent de l'Europe de l'est pour l'expérimentation. Peut-on vraiment appeler ça un album? Il est possible que chaque phase soit en réalité autonome, ce qui expliquerai la présence de covers pour chacune d'entre elles (ici). En bref, un chef d'oeuvre. Rarement le noise ne m'aura autant séduit.
Have Faith!
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