Poursuivons notre périple ambient avec la sortie du tout dernier Listening Mirror, projet du britannique Jeff Stonehouse, écrit et composé le lendemain même du décès de la chanteuse mexico-costaricienne Chavela Vargas à qui est dédicacé l'album en question. "On the passing of Chavela", c'est 61 minutes de balade au gré des champs étendus à perte de vue, venant faire écho à la longue vie menée par cette chanteuse à la voix si particulière qui nous a quitté en août dernier à l'âge de 93 ans. Paru au sein de la toute jeune structure Dronarivm basée quant à elle à Moscou et menée par Dmitry Taldykin, cet album-hommage vient compléter une discographie tout à fait généreuse à la musicalité et aux ambiances relativement personnelles et spontanées. Si le projet s'est quelque fois immiscé dans vos oreilles, vous saurez donc que le personnage est un féru de field recordings. Gardons en tête l'impressionnant What's Wrong with Miracles datant d'avril dernier, qui au moment d'écrire ces quelques lignes ne manque pas de filer des frissons malgré un grand soleil extérieur.
On the passing of Chavela joue la carte de la constance et développe une ambiance plus linéaire que l'opus cité précédemment même si l'on reconnait bien la touche caractéristique de Listening Mirror, notamment grâce aux injections de guitare soigneusement dosées. Nous imaginons aisément via ces légers pincements le souvenir d'une âme dématérialisée de son corps. Le souvenir est flouté par les années, mais le symbole demeure. Cette petite poignée de notes vient se diffuser en parfait équilibre avec les nappes brumeuses parsemées d'ombres vagabondes suggérées quant à elle par quelques voix délicieusement ouatées.
Notre escapade est longue, nocturne, rythmée par le chant continu des grillons et par un vent lunatique qui glace l'échine à chacune de ses apparitions, tandis qu'autour de nous les ombres se font plus omniprésentes. Votre corps attise tout de suite la curiosité, et les quelques êtres vivants (ou non) peuplant les lieux ne tardent pas à converger vers vous, ils vous observent, vous analysent, mais restent toujours à distance, installant alors un climat du pudeur et de pesanteur limitée. Le linceul enveloppant l'épopée est teinté d'un camaïeux légèrement grisâtre, car le britannique s'adonne plutôt à un exercice en clair obscur peu contrasté qui s'avère absolument poignant. Plutôt propice aux balades nocturnes, l'expérience pour le moins onirique préférera donc le post-crépusculaire au réveil matinal.
À la fois doux et parfaitement imprégnant, sombre mais étincelant, statique et pourtant élégant, l'album restera un hommage très personnel, émouvant et sincère, dont le ton profondément aérien ne manquera pas de se hisser vers la regrettée concernée qui nous regarde de tout en haut.
En écoute sur le bandcamp du label, via lequel vous pourrez vous régaler des autres sorties tout aussi saisissantes.
Have Faith!
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire